Actualités Enquête Immobilier Investissement immobilier Prix de l'immobilier Vivre au quotidien

Loi climat, indexation des loyers, permis de louer… 2023 : la nouvelle donne du marché locatif

2023 : la nouvelle donne du marché locatif

2023 marque le début de l'application de la loi Climat et Résilience, qui va devenir de plus en plus contraignante pour les propriétaires bailleurs. Mais, en ce début d’année, d’autres nouveautés impactent également le marché. Tour d’horizon.

Objectif 2050

Rappelons-le : le bâtiment est responsable d’environ un quart des émissions de gaz à effet de serre dans

l’atmosphère (entre 22 et 27 % selon les sources). Les limiter est donc un enjeu majeur pour respecter les accords de Paris, signés en 2015 qui visaient à limiter le réchauffement climatique à 1,5 °. C’est dans ce cadre que les parlementaires ont adopté la loi Climat et Résilience, dont les effets vont maintenant se faire sentir sur le marché de l’immobilier locatif. L’objectif est d’arriver à un parc immobilier « basse consommation » en 2050. Or, seuls les logements classés en A et B entrent dans cette catégorie. Les sénateurs ont exclus les logements classés C de la définition d’une « rénovation énergétique performante ». Il y a aujourd’hui, en France, environ 29 millions de résidences principales. Seules 7 % sont actuellement dans les clous.

L’objectif de la loi Climat et Résilience est donc, en priorité, de réduire le nombre des logements énergivores (classes F et G) en favorisant leur rénovation énergétique. Pour cela, l’État a mis en place des incitations fiscales et des aides financières pour alléger le montant des travaux. Mais, parallèlement, la loi a instauré des mesures restrictives qui vont inciter, voire obliger, les propriétaires immobiliers à mettre leur logement à niveau. 

La première concerne le montant des loyers et elle est déjà en vigueur. Depuis le mois d’août, il n’est en effet plus possible pour le propriétaire d’un logement classé F ou G d’augmenter le loyer de son logement lors d’un changement de locataire, sauf s’il réalise les travaux de rénovation énergétique. Il y a, en France, 4,8 millions de logements dans ce cas qui, bien souvent, sont occupés par des foyers à revenus modestes. 

La deuxième étape, qui débute en ce début d’année 2023, est plus contraignante encore. Elle consiste à relever le niveau de « décence » des logements et, surtout, à y intégrer la notion énergétique. A partir du 1er janvier 2023, les logements dont la consommation d’énergie finale est supérieure à 450 kw par m2 et par an seront considérés comme « indécents ». Cela représente, selon les estimations, autour de 70 000 logements dans le parc privé et 90 000 en tout. De nombreux propriétaires espéraient que l’application de cette mesure serait repoussée. Il n’en a rien été. Nuance cependant : elle ne s’applique qu’au moment d’un changement de locataire, pour tout nouveau contrat de location. 

Dès le 1er janvier 2025, c’est l’ensemble des logements classés G qui seront concernés. Les logements classés F ont un sursis jusqu’en 2028. Quant à la classe E, qui représente 40 % du parc, elle a jusqu’à 2040 pour se mettre aux normes. C’est 2048 pour les logements classés D.

Interdiction de louer ou pas ?

Petite nuance importante : le passage en logement indécent n’implique pas une interdiction pure et simple de louer. Cela interdit de relouer en l’état et cela oblige le propriétaire à mettre son logement au norme si le locataire en fait la demande. Pendant les travaux, le locataire peut bénéficier d’une réduction du loyer. Mais la loi ne prévoit pas de sanction automatique contre le propriétaire et c’est bien au locataire de faire valoir ses droits.

Comment sont fixées les évolutions des loyers ?

Comme le reste, le prix des loyers évolue chaque année, à la date anniversaire du contrat. Mais cette évolution n’est pas librement décidée par le propriétaire-bailleur. Ce dernier doit se conformer à ce que l’on appelle l’Indice de Référence des Loyers (IRL) pour savoir de combien il peut (sans y être obligé, bien sûr) augmenter le loyer. Avant 2008, cet indice était basé sur le coût de la construction, lequel pouvait, à certaines périodes, être supérieur à la hausse des prix. Un loyer qui augmente plus vite que le kilo de tomates… Pas très juste. Du coup, en 2008, une loi de protection du pouvoir d’achat (déjà !) a indexé l’IRL sur le montant de l’inflation (hors prix du tabac et des loyers, justement). L’idée étant que la hausse des loyers soit suffisante pour satisfaire le propriétaire, tout en étant supportable par le locataire. 

Seulement voilà, tout cela fonctionne quand l’inflation reste modérée. Or, pour la première fois depuis de nombreuses années, l’inflation atteint en France (et plus encore dans le reste de l’Europe) des niveaux élevés. Du coup, indexer les loyers sur le niveau de l’inflation reviendrait à les augmenter de 6 à 7 % d’un seul coup (l’inflation est actuellement de 6,2 % sur douze mois), ce qui serait insupportable pour les locataires. 

Un plafond pour les hausses de loyers

C’est la raison pour laquelle le gouvernement a décidé de plafonner l’indexation des loyers. Le plafond a été fixé à 3,5 %. On est donc loin du gel des loyers que certains demandaient pour protéger le pouvoir d’achat des locataires. Cette option a été écartée par le gouvernement qui la qualifie de « fausse bonne idée ». L’exécutif met en avant le fait que les bailleurs voient également leurs frais augmenter, du fait de l’inflation, mais aussi de la réglementation énergétique qui leur impose des travaux souvent coûteux. 

Ce niveau de plafonnement est loin, également, du niveau qu’aurait pu atteindre la hausse, sans doute entre 5 et 7 %. Ce plafond s’appliquera, au moins, jusqu’à l’été 2023. Notons, en passant, que la mesure s’applique également au PME, dont les baux commerciaux ne pourront pas être augmentés de plus de 3,5 %.

Un permis pour louer

Le Permis de louer est une disposition prévue dans la fameuse loi ALUR de 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme renouvelé. Il s’appuie sur un principe fondamental : le bailleur a l’obligation de proposer un logement décent. Cette obligation revêt également un caractère social et de sécurité, deux aspects auxquels les collectivités locales sont très attachées. 

La loi, donc, permet aux EPCI (Etablissement Publics de Coopération intercommunaux) ou aux communes de définir des secteurs où des démarches seront nécessaires pour avoir le droit de mettre un bien en location. Il peut s’agir soit d’une simple déclaration de mise en location, soit d’une autorisation préalable de mise en location, plus simplement appelée, « Permis de louer ».

Cette autorisation est mise en place dans les secteurs urbains où l’habitat est particulièrement dégradé. Elle est un levier pour favoriser la rénovation d’un quartier. Le principe, évidemment, c’est que le logement doit être inspecté pour voir s’il répond aux normes de décence et que, donc, l’autorisation peut être refusée. Dans ce cas, le propriétaire devra engager les travaux pour mettre son logement en conformité avant de solliciter, de nouveau, son autorisation. 

Des exemples locaux

Deux grandes villes des Régions Centre-Val de Loire et du Poitou ont adopté un Permis de louer, il s’agit de Châteauroux, dans l’Indre et de Niort, dans les Deux-Sèvres. Cette dernière fait même figure de précurseur puisque la mesure a été mise en place sur le quartier de la Colline Saint-André dès novembre 2018. Depuis mai 2019, 184 avis ont été rendus et 49 autorisations ont été refusées. Des travaux ont eu lieu dans 33 logements. La Ville précise que les propriétaires qui refusent de se conformer aux obligations encourent des amendes de 400 à 4 800 €. 

A Châteauroux la ville faisait récemment le bilan de la première année d’existence du dispositif qui a été mis en place le 1er septembre 2021. En un an, 1 190 demandes ont été enregistrées par les services de la Ville. Un tiers d’entre elles concernaient des particuliers, 41 % des mandataires et 26 % des personnes morales, donc des entreprises. L’immense majorité des biens (85 %) était constituée par des appartements, dont un quart de meublés. 

Au total, ce sont 800 décisions qui ont été rendues et 72 % étaient positives (soit 575 autorisations). Bémol tout de même, 429 logements comportaient des réserves, dont les trois quarts pour des points de décence. Sur les 225 logements jugés « non-décents », 63 ont finalement obtenu l’autorisation après régularisation et une contre-visite.

A l’occasion de ce bilan Magalie Bourdin, responsable du service habitat-logement de Châteauroux-Métropole rappelait que « « Ce permis n’a pas été imposé pour embêter les propriétaires, mais pour lutter contre l’habitat indigne, en particulier dans certains quartiers, îlots, que l’on soupçonne de renfermer de nombreux logements qui ne sont pas aux normes et mettre la main sur les marchands de sommeil. »

En France, ce sont plus d’une centaine de communes qui ont instauré un Permis de louer et tout porte à croire que ce nombre va beaucoup augmenter dans les années qui viennent.

Bon pour tous

En ce début d’année, des contraintes nouvelles apparaissent sur le marché de la location. Elles sont portées par des volontés louables : assurer un logement décent aux locataires et travailler à réduire la consommation énergétique. Elles ont aussi pour effet d’élever la qualité globale du parc locatif et ça, tout le monde a à y gagner.

 

Ne manquez pas nos analyses du mois sur les tendances déco 2023 et sur l’état du marché du neuf !